Trop occupé à arranger les sacs des uns et des autres, mon voisin de droite n’a pas remarqué que c’est contre une blanche qu’il se trouve écrasé. Il pousse un oh de surprise et laisse son bras un instant de plus que nécessaire contre le mien. Une souris ne passerait pas entre nous tant nous sommes serrés dans ce minibus direction Huye. On peut m’observer à loisir. Je suis si exotique. On détaille mon téléphone – tout un chacun possède un ou deux portables, mais l’iPhone reste une rareté fantasmée. Je suis si différente. Je sens qu’on touche et même qu’on arrache le plus discrètement possible un de mes cheveux. Je suis si exotique. Le chauffeur me regarde dans le rétroviseur, il monte le son de la radio, se trémousse et fredonne de son anglais artistique. Shape of you. Je la connais cette chanson, alors je tente quelque chose. Je me mets à chanter. Une voix, deux voix et bientôt tout le bus me suit dans le massacre du tube planétaire. Assurément une version différente, exotique.