Un chemin bordé d’arbres à quelques dizaines de mètres du village, il monte doucement. Comme ça, légèrement en surplomb, on peut voir les hautes plaines sétifiennes et les harmonieuses collines qui les entourent. Le vert tendre, la lumière douce, il n’est pas exclu de s’imaginer en Suisse. Des cyprès bien plantés et puis un muret de pierre délimitent ce qu’il reste du cimetière protestant, ce qu’il reste des Suisses, des Vaudois pour la plupart, des hommes et des femmes pauvres venus cultiver du blé et chercher la fortune en Algérie. Il ne subsiste presque rien d’eux. Les pierres tombales embellissent les fermes arabes alentour et les dépouilles ont été déplacées dans le cimetière chrétien de la ville. Pourtant, je suis prise d’un étrange sentiment. Comme si je les sentais, ces colons perdus, ces Suisses oubliés. Un sentiment étrange. Comme une familiarité, presque une nostalgie pour un projet que pourtant j’exècre. Dans les ruines de ce petit cimetière protestant, un étrange sentiment me rappelle que c’est cela aussi, être suisse.
Écrit dans le cadre d'un voyage de recherche financé par Pro Helvetia